On ne va pas y aller par quatre chemins : oui, Final Fantasy Tactics: The Ivalice Chronicles regorge de qualités. Oui, sa narration et ses thématiques sont poignantes et profondes. Et pourtant, il n’est pas à mettre entre toutes les mains. Sa complexité et sa difficulté rappellent immédiatement son époque d’origine, 1997. C’était un autre siècle, littéralement. À cette époque, les jeux savaient se montrer impitoyables et les joueurs avaient le temps de s’y consacrer corps et âme, faute d’être noyés sous des centaines de sorties par an. Cette mouture 2025 du Tactical RPG culte de Square Enix offre une refonte visuelle très réussie mais néglige selon moi l’expérience utilisateur, risquant de laisser plus d’un joueur sur le carreau. Et c’est bien dommage car le simple nom de la licence suffira à attirer de nombreux curieux que je vais tenter d’éclairer au mieux dans ce test.

Une fresque politique magistrale
La narration est incontestablement le point fort du jeu. Sans rien dévoiler, on suit les péripéties d’un groupe de personnages pris dans un tourbillon d’intrigues politiques et de rivalités entre royaumes. Les trahisons se succèdent, les complots pour le pouvoir s’enchaînent, et les thématiques sont abordées avec justesse et profondeur : lutte des classes, destin, égalité des chances, etc. Bonne surprise, cette édition propose à la fois la version originale et sa version remasterisée, toutes deux traduites intégralement en français. Mieux encore, la version remasterisée bénéficie d’un doublage complet en japonais et en anglais qui vient renforcer l’immersion dans cet univers d’une rare richesse.

Un tactical d’une exigence redoutable
L’aspect tactique, lui, est d’une richesse et d’une complexité impressionnantes, bien au-delà de ce que peuvent offrir des licences comme Fire Emblem ou Triangle Strategy. Et c’est justement ce degré d’exigence qui risque d’en décourager plus d’un à mon sens. Trois niveaux de difficulté sont proposés mais ne vous y trompez pas : même le plus bas ne vous ménagera pas. Farming obligatoire, compétences à maîtriser, synergies d’équipe à trouver… Final Fantasy Tactics ne fait aucun cadeau. Ici, chaque erreur se paie comptant.

Une liberté stratégique vertigineuse
Le champ des possibles a de quoi donner le vertige : jusqu’à 50 personnages peuvent rejoindre votre équipe, chacun pouvant se spécialiser parmi 38 classes différentes. Et une fois un certain niveau atteint, libre à vous de changer de classe pour mieux vous adapter aux affrontements. Attaques à distance, magie dévastatrice, altérations d’état, bris d’équipement : les options tactiques sont innombrables et encouragent l’expérimentation. Sur le papier, c’est un rêve pour tout stratège. Dans la pratique, c’est parfois un cauchemar de complexité.

Quand la richesse vire à l’excès
Mais cette générosité finit par devenir un fardeau. Dans Final Fantasy Tactics, tout — absolument tout — est une compétence. Une attaque chargée ? Compétence. Un sort ? Compétence. Un simple jet de pierre ? Oui, encore une compétence. Et c’est là que les choses se corsent : même l’utilisation d’une potion nécessite d’avoir appris la bonne aptitude. Une super potion ? Il faut une autre compétence. On en vient à se demander comment un héros aguerri peut oublier comment boire un flacon différent… Cette logique absurde s’étend à tout : chaque capacité, chaque objet, chaque action requiert un apprentissage spécifique. Et pour couronner le tout, les compétences ne s’achètent pas : elles se « lootent » pendant les combats.
Lorsqu’un ennemi tombe, son corps disparaît après 3 tours pour laisser place à un coffre ou un cristal. Le coffre offre de l’équipement, le cristal permet de récupérer des points de vie ou d’apprendre ces fameuses compétences. Mais uniquement celles que le défunt connaissait. Et uniquement si vous réussissez à déplacer un de vos personnages sur la case en question avant qu’un ennemi ne s’y rende pour, au hasard, se soigner. Résultat : il faut parfois garder un ennemi en vie pour espérer faire progresser son équipe, tout en priant pour que vos alliés contrôlés par l’IA dans les premières heures de l’aventure ne l’achèvent pas avant. Utile au début, cette aide devient vite un frein à votre progression, tant le jeu repose sur la patience et la maîtrise des moindres mécaniques.


Une interface d’un autre âge
Lors des combats, un autre défaut saute vite aux yeux : l’interface. La caméra a souvent du mal à se positionner correctement, obligeant le joueur à jongler manuellement pour obtenir une vue claire du terrain. Une vue aérienne existe, heureusement, mais elle peine à rester lisible dès que des dénivelés s’en mêlent. Autre frustration : contrairement à d’autres T-RPG modernes, on ne visualise pas la portée d’attaque des ennemis lors des déplacements. Il faut donc anticiper chaque mouvement à l’aveugle, sous peine d’exposer ses unités inutilement. Là où Triangle Strategy offrait des repères précis et une excellente lisibilité, The Ivalice Chronicles conserve un fonctionnement archaïque qui plombe l’expérience.
Et comme si cela ne suffisait pas, la mort d’un personnage en combat est définitive. Une erreur d’inattention et c’est une unité que vous perdez à jamais. Oui, ici, la difficulté porte bien son nom.

FINAL FANTASY TACTICS – The Ivalice Chronicles
📝 Conclusion
Final Fantasy Tactics: The Ivalice Chronicles est à la fois un hommage fidèle et une leçon d’humilité. Sa narration brillante, sa direction artistique soignée et la profondeur de son système de jeu en font une œuvre marquante mais aussi terriblement exigeante. Square Enix a magnifié le visuel, enrichi l’immersion sonore et respecté l’âme de l’original. Mais en refusant de repenser l’ergonomie et la rigidité de son gameplay, l’éditeur condamne une partie du public à la frustration. Les puristes du tactical y verront un joyau brut, taillé pour les stratèges patients. Les autres, eux, risquent d’y voir un vestige d’un autre âge : aussi fascinant que redoutable.
✅ Points positifs
- Une narration d’une grande richesse, portée par des thématiques fortes
- Deux versions incluses : l’originale et la remasterisée, toutes deux entièrement traduites en français
- Doublages japonais et anglais de qualité, qui renforcent l’immersion
- Un système tactique d’une profondeur impressionnante, laissant une grande liberté de stratégie
- 38 classes jouables et jusqu’à 50 personnages recrutables en même temps : de quoi construire des équipes uniques
❌ Points négatifs
- Une expérience utilisateur datée : interface rigide, lisibilité parfois pénible, caméra capricieuse
- Une courbe d’apprentissage abrupte, qui risque d’en décourager plus d’un
- Le système de compétences inutilement complexe, où tout — même l’usage d’une potion — demande un apprentissage
- L’absence d’indicateurs tactiques modernes (comme la portée ennemie visible) qui complique inutilement la stratégie
👨💻 Développeur : Square Enix
🏢 Éditeur : Square Enix
📅 Sortie : 30/09/2025
🎮 Plateformes : Xbox Series, PC, PS4, PS5, Switch
🧪 Testé sur : Xbox Series X
🎁 Code fourni par l’éditeur